Patrice BERTIN, 14 janvier 2010 sur france Info
Pour remettre les choses à leur place, un grand merci à son auteur pour son recul et son bon sens...
" A première vue, tout va bien. Les deux catastrophes qui ont fait trembler les Français ces dernières semaines semblent s’éloigner. Météo France annonce la fin de la vague de froid et un redoux généralisé sauf dans le quart nord est du pays. Le réseau sentinelle INSERM estime que très probablement l’épidémie de grippe H1 N1 est terminée. On aura donc survécu aux deux.
Ouf, qu’est ce qu’on a eu peur. Mais comme qui dirait à chacun son échelle de RICHTER évaluant la gravité des catastrophes naturelles et des angoisses sociétales. Dans le très confortable hexagone, il suffit d’un virus inconnu rappelant vaguement une vieille hécatombe pour provoquer une panique sanitaire majeure. Il suffit d’un bon moins quinze et quarante centimètres de neige pour déclencher l’alerte orange qui vire au rouge pour peu qu’un EUROSTAR s’arrête dans le tunnel. C’est alors qu’on sort les grands mots : sinistrés, naufragés, drame. Question de vocabulaire comme toujours…
C’est donc une France indemne qui contemple à la télévision l’horreur absolue du séisme en HAÏTI. Là bas, l’échelle de RICHTER la vraie, indique une secousse de 7,3 donc 2 degrés de moins que le maximum théorique possible. Pourtant, peut être 50 000 morts peut être le double parmi les 9 millions d’Haïtiens dont 95% sont descendants d’esclaves, 70% sous le seuil de pauvreté, 65% au chômage, et 45% analphabètes…
On comprendra que là bas les mots n’ont pas tout à fait le même sens qu’ici, ni les échelles de RICHTER la même gradation. Alors si l’épouvante de Port aux Princes réactive la grande chaine de la solidarité mondiale, tant mieux. Si le monde occidental abandonne un court instant la contemplation béate de son nombril graisseux, Encore bravo. Mais si en plus on pouvait désormais avoir davantage de mesure pour qualifier les petites péripéties de la vie quotidienne, vraiment ça ne serait pas du luxe. Et ca nous ferait remonter diablement sur une autre échelle de RICHTER, celle de la pudeur."